« Une efficacité à toute épreuve, une sécurité garantie. Notre médicament est le meilleur ! ».

Retenez bien cette accroche, car vous ne la verrez jamais… En tout cas pas en France. La communication santé est étroitement surveillée, notamment par les services réglementaires des laboratoires pharmaceutiques. Et rien n’échappe à leur œil aguerri ! Leur objectif : que la publicité soit conforme aux lois en vigueur. Pas de communication directe vers le consommateur pour les produits « soumis à prescription médicale obligatoire » ou «  remboursables par les régimes obligatoires d’assurance maladie ». (1) Pour la communication vers les professionnels, il faudra bien s’appuyer sur les recommandations des autorités de santé, présenter les données liées à la sécurité, replacer le médicament dans le cadre de la stratégie thérapeutique… bref, être neutre et transparent. Sans être fade ! D’où un vrai défi des communicants pour trouver une accroche, une signature, un univers qui retiennent l’œil et qui convainquent le patient, le pharmacien ou le médecin.

Depuis quelques années, cette tendance s’affirme et l’on peut même entendre gronder une rumeur dans le monde de la communication santé : « On ne peut plus rien dire ! Le réglementaire a pris le pouvoir ! ». Loin d’être un coup d’Etat, cette relative prise du pouvoir n’est que la réponse logique à l’évolution de la réglementation qui laisse – il faut bien l’admettre – de moins en moins d’espace à la prise de risque : depuis 2012, l’ANSM* vérifie toutes les publicités liées au médicament a priori et non plus a posteriori. Avant, les publicités étaient contrôlées de façon aléatoire. Aujourd’hui, rien n’est imprimé, mis en ligne ou diffusé avant d’avoir le blanc-seing des autorités de santé. Tant mieux diront les défenseurs des consommateurs, même si cela implique un surcroît de travail aux agences qui devront proposer parfois deux ou trois versions d’un même document pour obtenir les grâces de l’ANSM ! Sans compter les nouvelles contraintes liées aux dates limites de dépôt, imposant aux agences des délais particulièrement serrés.

Alors, quoi ? La communication santé serait morte ? Exsangue ? Vidée de toute créativité ? Evidemment non. Elle s’adapte. La communication purement centrée sur le produit est extrêmement balisée, c’est vrai. Ce n’est pas pour autant que les directeurs artistiques chôment devant leur page blanche. « Forcée à fonctionner dans un cadre strict, l’imagination tourne à plein régime, et produit ainsi ses idées les plus riches. Sans aucune contrainte, le travail risque de s’éparpiller » disait déjà le poète TS Elliot ! Et il reste un large territoire qu’il faut continuer à explorer : l’environnement du produit. Les laboratoires multiplient les projets d’éducation du patient, les outils pratiques d’aide aux médecins, les sites internet autour des pathologies phares. On parle moins des médicaments, plus de la prévention et de la prise en charge. Et si c’était encore mieux ?

Frédéric Albrecht, concepteur-rédacteur médical.

* Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.

  1. Site internet de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. http://ansm.sante.fr/Activites/Publicite-pour-les-medicaments/Modalites-de-controle-de-la-publicite