Le 6 novembre dernier, le Conseil d’État a ouvert la voie à la publicité pour les professionnels de santé. Où en est-on aujourd’hui ? Com&Health fait le point.

Ce que dit le Code de la santé publique

Aujourd’hui, le Code de la santé publique interdit aux professionnels de santé de faire usage de procédés directs ou indirects de publicité.


    • Article R. 4127-19 du code de la santé publique (CSP) : la médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce. Sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité et notamment tout aménagement ou signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale.
    • Article R. 4127-13 CSP : lorsqu’il participe à une action d’information du public de caractère éducatif et sanitaire, le médecin doit se garder de toute attitude publicitaire.
    • Article R. 4127-20 CSP : le médecin doit veiller à ce qu’il ne soit fait aucun usage publicitaire de son nom, sa qualité ou son activité professionnelle.

Si la publicité est interdite, celle-ci n’a pour autant pas de définition dans le Code de la santé publique. Selon la jurisprudence, il s’agit de “toute communication faite dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale dans le but de promouvoir la fourniture de biens ou de services et favoriser le développement de l’activité concernée”. Selon l’étude du Conseil d’État du 03 mai 2018, sur les règles applicables aux professionnels de santé en matière d’information et de publicité, la publicité relève de “tout procédé par lequel un professionnel de santé assure auprès du public la promotion, à des fins commerciales, de son activité”. Elle est à distinguer de l’information médicale qui, elle, inclut les messages et renseignements n’ayant pas ces finalités de promotion et de développement commercial de l’activité.

Concrètement, pour respecter son obligation à s’abstenir de toute attitude publicitaire, le professionnel de santé doit être attentif à certaines restrictions dans son exercice. Par exemple, si la création d’un site Internet est possible, celui-ci doit rester un outil pour donner des informations, sans revêtir de caractère publicitaire. Sa charte graphique comme sa ligne éditoriale doivent adopter une certaine sobriété et tout caractère de réclame est prohibé.

Réputation acquise et effet Doctolib

Si faire de la publicité est interdit, les professionnels de santé ont toutefois le droit de communiquer. Ils peuvent diffuser des informations dans la presse, faire l’objet d’un article, d’une interview, etc., et se construire ainsi une réputation.

En outre, l’apparition et le développement de Doctolib a créé une petite révolution. Cette plateforme de prise de rendez-vous médicaux en ligne, qui référence 70 000 professionnels, a aussi habitué les patients à rechercher des informations médicales sur Internet et à les noter sur Google, comme un restaurant sur TripAdvisor. Les professions de santé réglementées sont répertoriées sur le moteur de recherche aux côtés de spécialités non assujetties aux mêmes contraintes, qui peuvent, elles, acheter des mots-clés (ostéopathes ou naturopathes par exemple).

Novembre 2019 : le Conseil d’État lève l’interdiction de publicité pour les médecins et les dentistes

Devant ces distorsions entre ce qui est fait et ce qui est autorisé, mais également face à ce qui se fait dans les autres pays européens, le Conseil d’État a levé l’interdiction de publicité pour les professionnels de santé le 6 novembre dernier. « C’est un vent de liberté qui s’ouvre pour les médecins et les professionnels du secteur bucco-dentaire. Par sa décision, le Conseil d’État vient de mettre fin à 70 ans d’arbitraire et d’hypocrisie » s’est ainsi réjoui Fabrice Di Vizio, avocat spécialisé dans les questions de santé. « Il n’est pas question d’autoriser tout et n’importe quoi ou de supprimer toute réglementation. Mais la publicité procède de la connaissance, d’autant plus à l’heure des réseaux sociaux et des outils modernes de communication. En Italie, cette question est réglée depuis longtemps et la médecine ne s’est pas effondrée pour autant », a-t-il expliqué.

Aujourd’hui, le gouvernement est prié de rentrer dans les rangs et est contraint de procéder à l’abrogation de cette interdiction de publicité. Reste à savoir comment le Code de santé publique sera modifié en vue de cette réforme à laquelle les français sont à 64 % favorables estimant que cela permettrait pour le patient de disposer d’une information « honnête » (63 %), « loyale » (61 %), voire « désintéressée » (42 %). Gageons que la communication des professionnels de santé sera placée sous le signe de l’inbound marketing à travers la production de contenu à haute valeur ajoutée pour les patients.

By Com&Health
#FocusComandHealth